Approvisionnement en gaz

· dailyvici's blog

Quand bien même il n'y aurait pas eu de guerre en Ukraine, notre continent allait de toute façon devoir faire face à une baisse "physique" de la possibilité d'importer du gaz à l'avenir. Bien évidemment, nos démêlés avec un pays qui fournissait, avant conflit, 40% du gaz consommé dans l'Union, agissent comme un accélérateur, mais le coup était parti.

Telle est la conclusion à laquelle nous parvenons au Shift Project, à l'issue d'une analyse portant sur les possibilités d'approvisionnement en gaz de l'Union Européenne sous seule contrainte géologico-technique (on ne prend donc en considération comme facteurs limitants que le contenu des gisements et la capacité à faire des infrastructures d'extraction et de transport) : https://bit.ly/3HhowJ7

Ce travail - soutenu financièrement par le Ministère des Armées, RTE et le BRGM - a été mené avec comme matière première l'inventaire de la totalité des gisements mondiaux (y compris ceux restant à découvrir) fourni par Rystad Energy, ainsi que les les perspectives de production par gisement, ou encore les contrats déjà passés en GNL pour chaque pays importateur et chaque pays producteur.

Le graphique ci-dessous résume notre analyse. Il fournit les divers approvisionnements identifiés (via gazoducs ou via contrats pour le GNL) pour l'Europe, ainsi que divers niveaux de consommation possibles :

On voit facilement que la situation que nous allons vivre cette hiver ne devrait pas être suivie d'un "retour à la normale" sur les approvisionnements (et il se discute de savoir ce qu'est "la normale" quand la consommation de gaz devrait de toute façon baisser très rapidement pour des raisons de climat !).

Pour remplacer les importations qui n'ont plus lieu par gazoduc il faut recourir au GNL, sur lequel nous sommes en concurrence croissante avec les pays asiatiques, et il n'y en aura pas pour tout le monde. En outre le pic mondial sur la production gazière (sous seule contrainte géologique) est attendu aux alentours de 2030 avec les données fournies par Rystad.

Climat ou pas, Ukraine ou pas, le coup était aussi parti sur le pétrole (https://bit.ly/3F7Ty3y ). Rappelons que le charbon est aussi en baisse subie depuis les années 1950 (car les mines européennes sont de plus en plus vides et le commerce international de ce pondéreux solide n'est pas si simple).

Quand bien même nous ne voudrions pas faire d'efforts parce que l'UE ce n'est que 10% des émissions, que les américains ont une empreinte carbone individuelle 2 fois plus élevée que la nôtre, etc, nous allons devoir décarboner de toute façon. Il est plus qu'urgent de comprendre que nous sommes au début d'une évolution structurelle, et pas dans un accident de parcours.

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